mercredi 3 octobre 2007

Les chemins du plaisir 142

Selon Platon, le désir est productif en ce qu'il apaise le manque et la souffrance. Cette célèbre définition platonicienne se heurte à l'idée que le désir se suffirait à lui-même. Effectivement, si le donné se résume à l'ordre présent, on voit mal pourquoi une telle définition ne pourrait pas être produite. Effectivement, on comprend pourquoi aussi le désir qui s'achemine vers ce genre de représentation ne peut sombrer que dans la déliquescence ou la folie. Nietzsche, si tu nous entends... En attendant, cette complétude du désir nie la structure du réel dans sa finitude. Le fini absolu : définition (aberrante) du désir qui se suffit à lui-même. Car la structure du désir épouse le réel, en ce qu'elle est le signe le plus évident, chez le vivant, que le réel se perpétue dans l'incomplétude de chacun de se parties. La souffrance est le signe de l'incomplétude en perpétuelle perpétuation. On comprend que les pervers guignent au final cette souffrance comme le bienfait le plus proche de l'orgasme. La complétude de leur désir désespérément incomplet se situe selon eux dans l'acceptation de la souffrance et dans son exacerbation. Parole de nihiliste : je prends le désir tel qu'il est, lucidement; je l'observe dans ses oeuvres et son incomplétude; et je parviens à la conclusion que le seul moyen dans l'ordre de tendre à la complétude revient à magnifier la souffrance. La réduction ontologique explique le renversement du sens. Selon le métaphysicien classique, si l'incomplétude est bonne, alors la complétude est le danger et l'aberration. D'où le renversement nihiliste et pervers, typique du raisonnement sadien : si la complétude est bonne, alors l'incomplétude est moraliste et la souffrance le Bien Suprême. La folie nihiliste s'ancre justement dans l'équation réel=objet. L'intégration de la souffrance au désir, intégration inévitable, bon gré, mal gré, suppose que l'ordre soit appréhendé comme l'horizon indépassable (la limite repue) du donné et que le devenir soit nié.

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