Dans une note précédente, Christian de Bongain, alias Xavier Raufer, indique que 99% des informations que je relaie sur son parcours sont fausses et sortent des poubelles d'Internet. Bien entendu, il ne prend jamais la peine de préciser les informations incriminées, ni de les corriger. La lecture de l'enquête de Charpier est malheureusement éloquente. Non seulement les faits que rapporte Charpier se trouvent en remarquable adéquation avec ceux que rapportent le site Voltaire ou l'encyclopédie Wikipédia, mais, bien plus, les éclaircissements supplémentaires qu'il administre vont au-delà de ce que je laissais entendre. Qu'on en juge.
- Raufer commence par refuser de répondre aux questions de Charpier (p. 12).
- Il participe à l'équipe de rédaction de la revue Occident-Université, créée en 1964 (p. 92).
- Il signe dans le numéro 14 sa première contribution (p. 111).
- A l'automne 1965, il participe à l'équipée sauvage qui, aux côtés de Madelin ou Devedjian, s'empare d'un camion et remonte la rue Soufflot "en scandant des slogans anticommunistes" (p. 116).
- Le 4 mai 1968, Raufer est, en compagnie de Madelin, Robert, Tandler et consorts, au Relais de l'Odéon, où les manifestations "bolchéviques" sont durement stigmatisées. Certains militants d'Occident soupçonnent leurs chefs, Madelin en tête, de mener en douce des "tractations avec le pouvoir" (p. 160-161).
- La dissolution d'Occident en 1968 amorce deux stratégies, qui probablement s'entrecroisent : d'un côté, les partisans de la continuité, qui se lancent dans la création de partis nationalistes; de l'autre, ceux qui migrent vers les milieux giscardiens et les CDR, partisans de la stratégie de "droitisation de la droite" (p. 173).
- Alors que dès 1968, Madelin rejoint la revue Est et Ouest sous le pseudonyme de Burgonde, Raufer devient le secrétaire général de l'IHS dans les années 1970 (p. 188).
- Dès l'automne 1968, Raufer collaborait à l'Elite européenne, en compagnie de Duprat ou Asselin, un journal "qui prône l'unité des nationalistes" au nom du solidarisme ou de l'OAS principalement (p. 204). Au passage, on apprend que le surnom de Raufer est Bonne Soupe.
- En 1969, Robert organise de nombreuses tables rondes, avec Susini, ancien chef de l'OAS, des anciens de l'Elite européenne, comme Raufer, d'Occident/Jeune Europe, comme Tandler, et même Albertini boulevard Haussmann. Le but? Fonder Ordre nouveau, "traduction littérale d'Ordine nuovo, le mouvement activiste néofasciste italien" (p. 218-219).
- Le 9 mars 1971, Raufer, qui a "pris du champ" avec ON, participe aux échauffourées épiques autour du palais des Sports de Versailles, qui opposent le SO d'ON aux cohortes gauchistes et antifascistes (p. 225).
- En 1974, Raufer est, en compagnie du capitaine Sergent ou d'Alain Madelin, un des conseillers d'Hubert Bassot, le "metteur en scène de la campagne de Giscard" et dirigeant des Républicains indépendants depuis 1968 (p. 246). Hubert Bassot rejoint l'OAS en 1961 et fonde le journal L'Esprit public, sur ordre de l'OAS-métropole, et dont la ligne est libérale, proaméricaine et anticommuniste. C'est celle des Indépendants et d'un certain Edmond Giscard d'Estaing, un des membres influents du comité France-Amérique (p. 244).
- En septembre 1973, Penciolelli, ancien d'ON, crée, avec Barnay notamment, SERVICE, structure commerciale réalisant des journaux d'agit-prop, qui s'adresse à certains cercles patronaux, au GRECE d'Alain de Benoist, à Est et Ouest ou au Centre d'études asiatiques de Xavier Raufer, "qui publie un petit bulletin à la gloire des activités culturelles de Taïwan". En 1974, SERVICE travaillera pour l'UDR (p. 249).
- En 1980, Raufer, délégué général l'IHS, bat le rappel des troupes en vue de l'élection présidentielle, en mettant en avant le rôle de l'IHS dans l'affaiblissement de la CGT et du PCF, mais aussi dans son exercice de lobbying auprès de jeunes parlementaires comme Madelin ou Longuet (p. 308-309).
- p. 290-291, à propos de l'assassinat de Duprat, dirigeant du FN, en mars 1978, Campana, dans l'Argent secret, écrit, en 1976 : "Le groupe Albertini, outre des subsides patronaux français reçus directement ou par le moyen de l'institut de formation de cadres qu'il a organisé, touche parfois des commissions sur des marchés passés avec Taïwan. Il y a peut-être là une trace de l'activité de la CIA en France."
- p. 310, on apprend qu'au début de l'année 1981, une fronde interne oppose, au sein de l'IHS, les pro-Giscard, comme Raufer et Madelin, et les anti, comme Tandler ou van Ghele, proches de Pasqua.
- Le 30 juin 1981, Raufer démissionne de l'IHS, suite à l'élection de Mitterrand, le 10 mai 1981. Certains pensent qu'il aurait été exclu pour "procommunisme", ce dont il est permis de douter. Un courrier adressé au Hoover Institute explique qu'il "a décidé de se consacrer à sa carrière" (p. 315).
- A la fin de l'année 1982 paraît le premier livre de Raufer, Terrorisme, maintenant la France. "Raufer débute une carrière de spécialiste qui (...) a mûri à l'IHS quand il étudiait les mouvements gauchistes et faisait des conférences devant les chefs d'entreprise ou les cadres." En juillet 1980, Raufer a publié dans Est et Ouest une étude documentaire sur l'éventuelle apparition d'un "Parti communiste combattant" en France. Dans le cadre de l'Institut Supérieur du Travail, il édite en 1980 deux textes, l'un : "Gauche/extrême gauche émergence d'un nouveau langage"; l'autre : "L'idéologie de la jeune génération (16-20 ans) à travers le contenu social et politique de la "rock-music d'expression française" (p. 325).
- p. 326 : en 1983, Raufer "n'est pas encore chargé de cours à l'Institut de criminologie de Paris-II et son ami Jean Chalvidan, ancien de l'Elite européenne, ne l'y a pas encore rejoint pour y devenir le spécialiste du terrorisme basque; il n'anime aucun séminaire, ne dirige aucune collection. Ce n'est pas l'expert en sécurité que l'on connaît. Il débute une carrière d'écrivain et de journaliste. Lors de la parution de son premier livre, il se plie aux exigences de la promotion et fait preuve, d'emblée, d'un réel éclectisme. Le 23 janvier 1983, il participe à une convention sur le terrorisme organisée par le Renouveau juif." (p. 326).
- p. 326-327 : "Pour Xavier Raufer, tout cela est du passé. Tout comme son militantisme à Occident et à L'Elite européenne. Certes, il ne s'est pas pour autant converti au marxisme... Et ses opinions sont encore solidement ancrées à droite. Un mois après la convention du Renouveau juif, il est invité au cercle Renaissance fondé par son ami Michel de Rostolan, un ancien d'Occident, et Philippe Asselin, l'indéboulonnable directeur d'Occident-Université auquel il a adhéré en 1970. Ce cercle se veut le point de conjonction entre la "vraie" et la "fausse" droite. Entre l'extrême droite et la droite parlementaire. Il prêche l'œcuménisme dans la ligne de l'Elite européenne à laquelle certains de ses membres ont appartenu. Mais on y trouve surtout des militants et des sympathisants du Front national. Raufer y sera l'invité unique d'un dîner-débat consacré à son livre."
- En 1983, Raufer rejoint Magazine-Hebdo, lancé par Lefèvre, un ancien de la FEN et du GRECE (p. 327).
- p. 326, on apprend en note qu'en "2003, Jean Chalvidan est chargé du secteur hispanique au département de recherche des menaces criminelles contemporaines, à l'Institut de criminologie de Paris-II Panthéon Assas", tout comme Raufer donc. Est-il besoin de rappeler que la Corpo de droit de Paris offrit de nombreuses facilités à Occident, grâce notamment à Claude Goasgen (p. 94), futur député de Démocratie Libérale et de l'UMP, dont Wikipédia nous apprend qu'"après des études au lycée Henri-IV, il rentre à la Faculté de droit de l'Université de Paris, qui deviendra après Mai 68 l'université Paris-II (Panthéon-Assas). Il fut notamment président de la Corpo d'Assas, une association estudiantine, et viscéralement hostile au totalitarisme communiste, dans un contexte de guerre froide, se lie d'amitiés avec d'autres étudiants en droit ou de sciences politiques comme Alain Madelin, Hervé Novelli, Patrick Devedjian, Gérard Longuet, membres alors du mouvement nationaliste d'extrême droite Occident."?
Grâce à sa fiche rédigée dans le réseau Voltaire, nous apprenons que Raufer :
- en 1970-71, collabore à Défense de l’Occident.
- en 1971, est membre du Conseil national d’Ordre nouveau et candidat de ce parti aux élections municipales dans le IXe arrondissement.
- anime notamment un Centre d’études asiatiques faisant affaire avec l’Association pour la promotion des échanges commerciaux et touristiques avec Taïwan (ASPECT). Cette association est alors perçue comme proche des services américains en charge des relations entre le patronat français et Formose.
- en 1973, adhère aux Républicains indépendants.
- en 1978, est permanent au Parti républicain (ex-Républicains indépendants).
- en 1979, entre à L’Express sous le pseudonyme de Xavier Raufer.
- en 1981-82, consultant pour la "cellule élyséenne".
- en 1984, selon Taguieff, organise des dîners-débats pour assurer la promotion de la Nouvelle droite.
- en 1986, selon René Monzat, il serait la personnalité anonyme interviewée comme Monsieur antirerrorisme de Charles Pasqua, dans la revue Eléments (n° 61, hiver 86) d’Alain de Benoit. Il aurait alors été analyste aux côtés de Jean-Charles Marchiani.
- en 1986, est membre correspondant du National Strategy Information Center (Washington). Donne un cours de criminologie à l’université de Georgestown.
- engagé aux Presses universitaires de France (PUF) par Pascal Gauchon (ex-PFNE), Xavier Raufer devient directeur de la collection Criminalités internationales.
- collabore au Figaro-Magazine et participe aux émissions de la station d’extrême droite Radio Courtoisie.
Enfin, dans les archives de l'INA, quatre apparitions de Raufer sont disponibles. Le téléspectateur qui suit ces diverses émissions pour s'informer découvre un expert remarquablement renseigné, au discours clair et pondéré, présenté comme journaliste ou criminologue, en tout cas un savant de haut niveau, qui dispense un savoir impartial et objectif. Qui se douterait que Raufer est le pseudonyme abritant le parcours tumultueux d'un homme qui n'est certainement pas spécialiste de terrorisme et de criminalité par hasard?
- Dans le Soir 3 de France 3 du 10/01/1988, Raufer intervient en tant que criminologue pour mettre en garde contre l'organisation tissée autour des militants d'Action Directe.
- Dans le Soir 3 de France 3 du 08/02/1991, Philippe de Saevsky reçoit un certain Xavier Raufer de l'Express au sujet d'un dossier consacré aux mouvements islamistes dans le monde et à Saddam Hussein.
- Sur le plateau de Midi 2 d'Antenne 2 du 18/08/1994, Raufer est invité suite à l'enquête très fouillée qu'il a réalisée sur le terroriste Carlos dans le dernier numéro de l'Express. Il est présenté comme un journaliste de l'Express. Raufer aborde aussi les liens entre Carlos et l'avocat Vergès. Le présentateur explique que Raufer a eu l'occasion de consulter certains documents de la Stasi.
- Dans le 20 heures d'Antenne 2 du 19/01/2002, Raufer intervient, lors d'un reportage consacré à une nouvelle forme de braquage qui a recours à des voitures bélier pour défoncer les devantures des bijouteries attaquées. En tant que criminologue, il dénonce l'inadaptation des moyens policiers aux nouvelles méthodes violentes du grand banditisme.
- Lors de l'émission Mots croisés du 27/05/2002, diffusée sur Antenne 2 et consacrée à la menace terroriste en Europe, Xavier Raufer est consulté par la présentatrice Arlette Chabot en tant que professeur de criminologie. A ses côtés, Gilles Kepel, professeur de Sciences politiques; Thérèse Delpech, chercheur CERI; Gérard Chaland, géostratège. En duplex de Washington, Laurent Murawiec, analyste politique Rand Corporation, fait le point sur la situation aux États-Unis, sur les craintes liées aux armes chimiques et bactériologiques, sur une éventuelle intervention américaine en Irak pour renverser le régime de Saddam Hussein.
(- Selon Wikipédia "Thérèse Delpech est une ancienne élève de l'École normale supérieure, agrégée de philosophie. Elle a occupé le poste de conseillère auprès du Premier ministre pendant deux ans. Elle fait également partie du comité éditorial de l'édition française du magazine Foreign Policy, dont le premier numéro est sorti en septembre 2006. Elle est directeur des Affaires stratégiques au Commissariat à l'énergie atomique (CEA) depuis 1997. Elle est chercheur associé au Centre d'études et de recherches internationales (CERI), membre du conseil de direction de l'Institut international d'études stratégiques, un think tank de recherches géostratégiques basé à Londres, et membre du comité consultatif pour l'Europe de la Rand Corporation. Elle a été invitée au Bilderberg en mai 2005."
- Selon le réseau Voltaire, "ancien conseiller de Lyndon LaRouche et de Jean-Pierre Chevènement, Laurent Murawiec a brusquement changé d’options politiques pour rejoindre la Rand Corporation. Le 10 juillet 2002, il présenta ses travaux devant le Defence Policy Board, à l’invitation de Richard Perle, et préconisa le renversement des Saoud en Arabie et l’anéantissement de l’islam. Il est aujourd’hui chercheur au Hudson Institute de Washington, un think thank dont Richard Perle est administrateur. Il est l’auteur notamment de La Guerre au XXIe siècle et de L’Esprit des nations.")
Bien entendu, des erreurs factuelles ont pu se glisser parmi ces sources. Cependant, le moins qu'on puisse oser, c'est que les informations glanées sur la Toile et surtout dans l'ouvrage de Charpier sont concordantes et assez inquiétantes. Elles révèlent, dans le parcours de Raufer, du nationalisme le plus virulent jusqu'à la chaire de criminologue et de consultant, un point commun avec, par exemple, le parcours vers l'ultralibéralisme d'Alain Madelin, un proche de Raufer (du moins dans les années 1970) : Raufer exprime la nécessité sécuritaire qu'exige tout programme élitiste (l'inégalitarisme engendrant la montée de l'insécurité, singulièrement des violences extrêmes et gratuites, notamment chez les jeunes) et le fait que ce souci sécuritaire majeur s'associe étroitement avec la préoccupation d'ordre atlantiste ou pro-américain, dont on trouve les traces chez nombre d'anciens nationalistes passés avec armes et bagages à l'ultralibéralisme. Il est vrai que les Américains les premiers ont subi les stigmates de l'insécurité liée à l'ultralibéralisme et ont développé les premières campagnes ultrasécuritaires, dont la sévérité n'a d'égal que l'élitisme qu'elles cautionnent. Inutile d'ajouter que, dans ce parcours, comme dans celui de nombreux anciens militants nationalistes ralliés à la droite démocratique (VGE, Pasqua, Chirac, les RI, DL, PR, RPR, CNIP, UNI, UMP...) plane l'ombre des services secrets français (RG, DST, SDECE/DGSE, voire SAC, qui n'est pas un service secret, mais la police parallèle gaulliste) et américains (CIA).
mardi 21 août 2007
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