dimanche 16 septembre 2007
Les chemins du plaisir 56
Les porte-paroles du milieu X font mine de prétendre que la pornographie est une nécessité qui existera toujours. Je serais loin d'être aussi catégorique sur cette assertion, partant du principe que ce qui n'a pas toujours existé n'est pas assuré d'exister toujours. Et si la pornographie n'était qu'une mode propre au nihilisme, et qui, le nihilisme évacué, retournerait dans sa boîte? Que je sache, les films de cul, qu'on part louer en douce sous le manteau aux bornes anonymes ou qu'on télécharge sur Internet en toute légalité et en toute liberté, n'ont pas toujours existé. Et pour cause : leur essor, comme par hasard, est lié à l'essor conjoint de la technique et de la technologie. Auparavant, les représentations pornographiques étaient bien moins influentes, parce que l'homme ne baignait pas dans le nihilisme. L'homme avait suffisamment de repères religieux pour que son désir n'ait pas besoin de se réfugier auprès de la destruction pure, de la violence pure, pour se connecter avec l'énergie de son désir. Si je puis me permettre : auparavant aussi, la pornographie bénéficiait du grand style, l'érotisme bucolique de Sapho ou les délires au grand style de Sade. Aujourd'hui, la violence pure a logiquement charrié la répétition pure. Les films X bégaient et sont condamnés, pour prétendre à la différence, et récolter un échec cuisant, de pratiquer des surenchères échevelées. Entre un film d'Emmanuelle (personnage de fiction) et un pur produit de KatsuNi (personne en chair et en os), il n'y a pas que la fiction qui ait perdu la face face à la suprématie hégémonique de l'individu en chair et en os. Le spectateur en mal de transes-gressions est passé de sombres digressions dévêtues à d'éclatantes agressions revendiquées comme états assumés de satisfaction orgasmique. Hic! Où est le hic? Toc toc! Où est le toc? S'il est certain que la violence et la sexualité ont toujours fait bon ménage, la pérennité d'une civilisation se mesure à l'aune de sa faculté à organiser cette violence pour lui faire quitter les rivages de la destruction et de l'anéantissement et l'aménager, pour le meilleur et pour le pire, en création et en énergie positive. Le bouc émissaire est une tentative cruelle qui prouve l'existence de cette transmutation et de cet aménagement. Le pardon et l'égalité comme refus de la violence aussi. Le problème, c'est que les tentatives humaines sont confrontées au ressac du réel, je veux dire à cette violence qui sans cesse se représente, obstinée et intransigeante, et qui a besoin d'être aménagée pour que la civilisation triomphe de la barbarie - pour que l'humanité soit. L'homme du vingtième siècle, lassé des guerres et des luttes, a décidé de faire l'homme planétaire et de vivre en paix. Moralité : il fonce dans le mur et n'a jamais été aussi proche du porche, pardon, du mur que depuis qu'il refuse d'affronter la violence et de l'aménager. Moralité : c'est au moment où le nihilisme prétend imposer son agencement lénifiant et destructeur que la pornographie pointe le bout de son museau. Qu'on ne s'y trompe pas, le signe est d'importance. Ce n'est pas un museau de bête sauvage qui se signale à nos sens exténués. Plût au Ciel qu'une lionne ou un léopard se soient montrés, repus et rassasiés de leur carnage! Malheureusement, c'est bien le museau d'une créature mythologique qui nous a annoncés l'imminence du danger. Quand la barbarie pornographique frappe aux portes de la représentation, quand elle prétend abolir l'art par l'Hyperréel, l'anéantissement est aux portes. Alors, on discute avec Ovidie d'éducation ou on prend vraiment la violence en main? Slogan de la campagne de prévention : moi, j'aménage la violence, quand Ovidie, la violence l'habite?
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