Enthoven : " Votre théorie, c'est de dire que pour retrouver l'humain, il faut reconquérir des concepts abolis par la pornographie, comme le moi et l'autre, le masculin et le féminin. Ca, ça reste à voir... La liberté et la contrainte. Ca aussi, ça reste à voir... Le beau et le laid, ainsi que la transgression, l'interdit, la pudeur et l'intimité. Pourtant, pardonnez-moi, masculin/féminin, moi et autre, liberté et contrainte, beauté et laideur, tout ça se trouve dans la pornographie? Vous dites : on peut arriver à la sexualité sans forcément la couvrir d'ordures. Oui, peut-être, mais : et si l'excitation passait justement par le fait d'être un objet pour l'autre, par le fait d'être l'esclave de l'autre? Après tout, ça n'est qu'un jeu?
Marzano : - Bien sûr!
- J-e-u...
- Bien sûr!"
1) Marzano a tort d'approuver en apparence la prise de parole pompeuse et retorse d'Enthoven pour mieux le contredire par la suite. Il est aisé de démontrer le mensonge contenu dans son propos, en tout cas à l'écrit. A l'oral, c'est une autre paire de manches, car le bougre brasse de l'air.
2) Marzano a raison d'insister sur l'imitation dévoyée de la métaphysique par la pornographie. Selon la postphysique d'obédience pornographique, le moi est une chose, l'autre un objet de domination (un esclave), l'homme et la femme, non plus des sexes, mais des pâles instruments érotiques ramenés à leur répétition forcenée. Les valeurs de la métaphysique sont présentes de façon caricaturale dans la mesure où elles ressortissent à chaque fois de la réduction et de la déformation ontologiques. Si la métaphysique platonicienne repose elle aussi sur des postulats faux, elle avait l'insigne mérite de respecter les équilibres vitaux de l'homme, tandis que la pornographie est la métaphysique du diable en ce qu'elle promet l'homme à sa ruine en cas de réalisation de son programme mortifère.
3) La remise en cause à la mode de la masculinité et de la féminité au nom du féminisme est un symptôme de décadence. On pourra s'enquérir de ce débat le jour où les hommes porteront des enfants comme les femmes ou le jour où les femmes ne porteront plus leurs enfants (mères porteuses artificielles ou robots dévolus à cet effet...). Même ce jour, il faudrait agir avec prudence et circonspection. Les actuelles récriminations pour supprimer la différenciation sexuelle relèvent des impératifs catégoriques de l'Hyperréel, selon lequel toute altérité doit être abolie au nom du règne sans partage du Même.
4) Quant au point crucial, l'idée que l'excitation passe par le fait d'être un objet pour l'autre, par le fait d'être l'esclave de l'autre (je reprends les termes d'Enthoven porte-parole des nihilistes hédonistes), il est sidérant qu'on puisse présenter l'excitation sexuelle sous un jour aussi réducteur et destructeur. Qui perçoit l'excitation sur ce mode totalitaire charrie des fantasmes que je qualifierai d'abîmés ou de défectueux. Que je sache, les jeux complexes du fantasme se révèlent plus chatoyants et tendent à n'ordonner l'objet que dans la mesure où le propre du fantasme est de ne pas se réaliser - à l'inverse de la pornographie. Précisément, la reconnaissance de la personne comme fin passe par le fait que le fantasme ne se réalise pas en tant que fantasme et que sa réalisation effective opère une disjonction qualitative avec l'imaginaire qui sous-tend l'excitation. Le passage à l'acte suppose un supplément d'âme qui établit la reconnaissance de l'individu comme fin et non moyen, dans une mystérieuse alchimie où l'acte sexuel de procréation, de différence et de création implique autre chose dans son élaboration que le simple mécanisme réducteur de l'objet.
5) Pour finir, je vais être méchant et cinglant, mais c'est Enthoven qu'a commencé (m'dame!). Il s'est montré sanglant, y compris après qu'il ait été dit à la maîtresse. Je déteste colporter les ragots, mais puisqu'ils sont accessibles, puisque Justine Lévy a publié un livre à peine maquillé de confessions (peut-être pour partie contestables), il n'est pas admissible qu'Enthoven ose son : "Après tout, ça n'est qu'un jeu?". N'a-t-il pas constaté à son corps défendant ce qu'il en coûtait de jouer avec les sentiments, sans que son divorce d'avec sa femme de l'époque, la fille de BHL, le meilleur ami de votre père, et son union avec Carla Bruni, top bien connu, chanteuse injustement célébrée, ancienne maîtresse de Mick Jagger, de Louis Bertignac, mais aussi maîtresse à l'époque des hauts faits de papa Enthoven (mais oui : bonjour, la décadence tendance fin de règne romaine!) ne l'ait amené à remettre en question sa conception du jeu, ni à distinguer (c'est l'aveuglement pervers qui afflige aussi les manipulateurs actifs de la violence, pas seulement les victimes passives de la relation destructrice) les effets de la violence sur Justine Lévy, mais aussi sur sa propre personne. Au final, le nihilisme attaque tout le monde et personne ne parvient à s'extirper du cercle vicieux. Justine Lévy publie Rien de grave et soigne son mal par l'exhibition pseudo-littéraire; Raphaël Enthoven poursuit sa route brillante, fulgurante et, malheureusement dans son mauvais sens, - insignifiante.
6) Bien que j'attaque le pauvre Enthoven avec virulence, je tiens à préciser à mon lecteur que je respecte très fort sa personne et ses qualités!
mardi 11 septembre 2007
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