Enthoven parle de "formes affadies ou suggestives" qui prendraient le relais commun des valeurs explicites ou pornographiques du sexe. Exemple : une femme qui lèche une glace. "Tout ce qui signifie (...) la pornographie en la taisant." Réponse d'Ovidie : "Je trouve ça très hypocrite, en effet, oui... (...) On dit la pornographie est partout. Donc on nous tape sur les doigts, en disant que nous, pornographes, nous sommes partout, nous affichons nos images partout, ce qui est absolument faux, puisque tout à l'heure, votre assistante (...) disait qu'on ne trouvait pas facilement mes films. Donc c'est bien la preuve que nous pornographes, nous n'affichons pas nos produits partout. En revanche la pornographie est absolument partout aujourd'hui, dans les médias, dans les émissions grand public, dans les journaux classiques, dans la publicité, et je trouve extrêmement hypocrite qu'on vienne nous taper sur les doigts, à nous, alors que, à l'heure actuelle, quand on regarde une chaîne hertzienne, on va voir une grande émission avec des filles prostituées clairement, qui sont payées pour couch-cher [accent très bourgeois et puéril à cet instant] avec des couples, officiels, etc., etc. (...) Je pense très clairement à l'Ile de la tentation, où ce sont des prostituées qui sont payées pour venir draguer le conjoint de machin ou machine... Donc je trouve ça très hypocrite, qu'on vienne nous dire au final que c'est nous qui venons corrompre les moeurs de la société et traumatiser les enfants, je trouve ça un petit peu limite."
1) Les formes affadies sont-elles les dérivés des formes véritables? Auquel cas Enthoven n'a rien compris, puisque ce qu'il prend pour des formes véritables ressortirait de la catégorie inverse, des fausses représentations véritables prises pour des représentations véritables. Il est bizarre de suggérer que les valeurs de plus en plus explicites de l'implicite de grande consommation tendent à rejoindre le modèle véritable, comme si la pornographie était censurée en tant que vrai modèle.
2) Ovidie fait de la victimisation. Toute personne qui s'adonne à la victimisation n'est pas une victime. Passons. Surtout Ovidie a le mérite de la franchise. Elle dit "nous, pornographes" à plusieurs reprises, expression explicite couplée à un nous omniprésent. Cette répétition fait très mafia action. J'ignorais qu'il existât un milieu de la pornographie, un clan soudé, un groupe d'intérêt affiché et uni, Ovidie en témoigne! Elle use d'un langage très inquiétant, où les valeurs de la famille évoquent étrangement d'autres climats et d'autres cieux. Sont-ils si étrangers qu'Ovidie feint de le croire à l'univers de la pornographie, soit son univers?
3) Tiens? A présent, Ovidie mentionne des produits de la pornographie... Il faudrait savoir! Tout à l'heure, elle prétendait encore que les films X étaient des oeuvres d'art à part entière... Belle exemple de cohérence!
4) Ovidie est la première à dénoncer l'hypocrisie, soit le fait de diaboliser la pornographie explicite pour mieux réinvestir ses valeurs de manière implicite auprès du grand public. Merci, Ovidie! La vérité sort de la bouche des enfants. Les représentants des médias et du système ne pourront plus prétendre qu'ils sont de bonne foi. Quant au raisonnement de fond, il est tordu. Car, si l'on passe sur les responsabilités évidentes de chacun dans cette dissémination de la pornographie, dans ces métastases X qui risquent de dégénérer en gangrène politique hard (ah, mon Salo!), il faut en tenir une couche pour venir expliquer que l'hypocrisie consiste à piquer les bonnes idées et à les travestir. Sous-entendu : la pornographie est le Bien interdit, qu'on réprime et qu'on discrimine, pour mieux en vendre l'avatar dégénéré. Si la pornographie était ce Bien idéalisé (quel moralisme, mes aïeux!), ses contrefaçons seraient peut-être moins excellentes, en tout cas fort appréciables... On passerait d'un Idéal à un Pas Mal tout de même présentable. Or tant Enthoven qu'Ovidie tombent d'accord pour stigmatiser le recyclage hypocrite et implicite de la pornographie. Ovidie : représentante du milieu de la pornographie (n'oubliez surtout pas le nous!); Enthoven : représentant coopté du nihilisme tendance hédoniste désenchantée (n'oubliez pas le paquet de clopes!). Autrement dit : Ovidie argumente d'une manière incohérente et affligeante, totalement retorse, voire démente. Enthoven, joue ton rôle de modérateur et de présentateur! S'il te plaît, même si tu n'es pas Bentley, mets-lui le nez dans son caca de prédateur!
5) Ovidie ment concernant l'omniprésence explicite de la pornographie. L'ancienne législation, fort satisfaisante dans son ensemble, se trouve en effet contournée et gravement mise à mal par le phénomène Internet lié à la mondialisation, autrement dit la dérégulation ultralibérale du marché du sexe et son accès rendu beaucoup plus aisé qu'auparavant. Encore un mensonge, énoncé sans contradiction, mine de rien! Chapeau, l'artiste!
6) La mention de dissémination hypocrite de la pornographie est intéressante dans la bouche d'Ovidie. Elle signale que la pornographie, contrairement à ce qui est prétendu par les moralistes pro-pornographie, ne souffre pas d'un excès d'interdit, mais d'une reconnaissance généralisée et tacite. La mentalité pornographique, loin d'être marginalisée, est en fait à la mode. Dont acte, contact!
7) La révélation finale de la prostitution qui sévit dans une émission grand public de TF1, chaîne populaire s'il en est, est éblouissante. Elle jette une lumière crue sur un milieu qui se veut pourtant diaphane, et je pense notamment à notre cher Cauet. Soit Ovidie divague, soit elle se montre étonnamment claire quant à l'illégalité et l'impunité effarantes des puissants. Moi qui estimais qu'une production qui employait des personnes prostituées était passible de condamnation pour proxénétisme (et aggravé, ma bonne dame!)...
8) L'exemple que choisit Ovidie est cruel pour ses intérêts. Heureusement, notre passionnaria de la cause X (qui ne désigne nullement une cause anonyme!) ne voit pas plus loin que le bout de son nez. Elle révèle ainsi des pratiques qui montre, s'il en était besoin, le lien consubstantiel entre prostitution et pornographie, lien pourtant explicitement indiqué par l'étymologie de pornographie. Ca, Enthoven feint de l'ignorer!
9) L'ambiance délétère et perverse déjà perceptible dans le principe de l'Ile de la tentation, titre au demeurant investi de relents fort sadiens, s'enrichit d'un nouvel haut fait, qui indique le moteur et les principes à l'oeuvre dans la pornographie. Que faut-il dès lors faire? Déréglementer et légaliser totalement la pornographie pour déborder les pornographes honteux, pudibonds et hypocrites - les tartuffes de la ré-cul-p'(y Don s'en fout)? Prohiber intégralement la pornographie et déclencher un nouveau maccarthysme peu souhaitable? Ni l'un, ni l'autre, mon cher Watson (mon meilleur ami depuis que je me suis mis à l'opium). Les béances de la législation française indiquent assez que le problème est mondial et qu'une législation à cet effet manque cruellement, comme manque cruellement une législation en général. Le problème dépasse donc la simple pornographie et investit en fait la sphère de l'ultralibéralisme. Si la résolution est complexe, le symptôme ne se résume certainement pas à l'antienne bien connue dont (ab)use Ovidie : c'est la faute de la société, m'sieurs dames! Système hypocrite de merde! Pour finir, la vérité dont je dispose, qui n'est pas l'intégralité de la vérité, mais sa part présente (alors qu'Ovi-die/t (archi) faux) : le problème précis de la pornographie provient du système politique qui gouverne la société et qui contribue logiquement à mettre en lumière toutes les activités sexuelles tendant à faire du vivant un objet. L'ultralibéralisme s'appuie sur une morale ontologique extrêmement claire, dont le besoin provient de la réclamation pressante de définition précise (et impossible) du réel : le réel est un objet, le réel est un moyen.
Elémentaire, mon cher Watson!
vendredi 14 septembre 2007
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