lundi 20 août 2007

La mort dans l'âme

Le propre de la télévision étant de dresser l'apologie sans frein de l'Hyperréel, rien de surprenant à ce que cette même télévision soit l'outil de représentation et de prédilection du direct et de la nullité aggravée à chaque épisode. Le direct se prétend comme l'acmé de la vérité, le privilège consistant à capter le réel dans son immédiateté et sa première apparence; le propre de l'Hyperréel est de dispenser une ontologie du Même débarrassée de l'autre, monde dans lequel l'effort joue le rôle de différence et de différenciation insupportable et inacceptable. Il est tout à fait logique que dans ce monde, le refus de l'effort joue comme revendication de l'éternelle répétition et accession au monde de l'idéal et de la perfection. Le monde du Même suppose la médiocrité et l'éternelle répétition suppose la déchéance vers la décadence. La télévision est bien le médium jouant à plein son rôle de révélateur de l'époque, de prophète vaguement fou du roi (détrôné) annonçant l'ère nouvelle de l'Hyperréel. Il n'est pourtant pas certain que ce combat soit gagné d'avance. A en juger par l'ire grandissante qui gagnent les téléspectateurs à mesure qu'ils subissent les programmes de télévision, un message d'espoir mérite d'être dispensé. S'il est malheureusement de l'ordre du constat de vérifier que nombre d'aspirations humaines mènent à l'Hyperréel, il est tout aussi évident que l'homme n'est pas enclin à supporter cet état de fait qui mène à sa disparition prochaine. L'homme n'est heureusement et nullement disposé à consentir les bras croisés à ce que le monde de l'homme, son monde, recouvre, de son ombre et de sa puissance tutélaires, le réel. L'entreprise actuelle, qui vise à dénier le réel et à le remplacer par l'Hyperréel niais et falot, avec plus de pertes que de profits, est ainsi condamné à l'échec. En tant que héraut consommé de la consommation forcenée, la télévision envoie une première salve de sommation : c'est le monde de l'Hyperréel qui va s'écrouler, c'est le monde de l'homme dans son configuration actuelle qui court à sa perte et à sa fin, gare! Le réel, lui, est indestructible et il est disposé pour de nombreuses années encore à accueillir l'homme, à condition bien entendu qu'il ne faillisse pas sur ses devoirs élémentaires, à commencer par la reconnaissance de l'effort comme garantie de pérennité et sur l'adoubement de la différence comme complément et prolongement naturels de la répétition.

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