samedi 15 septembre 2007

Les chemins du plaisir 39

L'expression libre-échangiste est fascinante. Son acception et son acceptation universelles en disent long sur la conception totalitaire qui est reliée à la liberté. En l'occurrence, les échanges libres ne désignent nullement des théories économiques d'obédience libérale, mais une conception de la liberté littérale. Soit le fait de revenir à la structure du désir chaotique. La liberté revient ici à faire ce que l'on veut. En tout cas, le libre-échangiste est considéré (surtout par lui-même) comme libre dans la mesure où il accède à une dérégulation de sa sexualité, qu'il repousse les limites ordinaires et franchit le Rubicond (rubis-con) de l'exception. Où l'on constate qu'il n'est pas du tout certain que l'absence de limites soit le signe d'une libération du désir, mais que la liberté conséquente ne peut se penser qu'en fonction du critère de sa limitation. Que dirait-on d'un énergumène qui se prétendrait libre-penseur dans la mesure où il transgresse le champ de la cohérence politique et s'affirme nazi de choc? Un nationaliste néo-marxiste comme Soral, que je ne qualifie nullement de nazi, n'est certainement pas plus libre qu'un conservateur modéré comme Aron. De la même manière, un libre-échangiste n'est certainement pas plus libre qu'un homme fidèle. L'inverse est même vrai. Pourquoi? Parce que le libre-échangiste échange des moyens ou des objets et assimile la personne à ces réductions ontologiques terribles de violences en tous genres; quand le fidèle-échangiste pose la limite de la personne, soit de l'infini et du néant comme parties inexpugnables de notre finitude. De toute manière, il est certain que les notions de liberté et de consentement ne veulent rien dire dans les faits et qu'elles explosent (en vol) au moment où la modernité les convoque le plus, dans toutes les situations où la violence pointe le bout de son nez - et plus la violence gagne en intensité. La liberté/consentement chez Enthoven Jr., élève brillant et remarquable, titulaire de titres prestigieux, qui a le choix, mettons, entre produire des émissions prestigieuses sur France Culture ou donner des cours à Sciences politiques Paris (ou les deux à la fois) diffère du tout au tout avec la liberté/consentement d'une étudiante roumaine pauvre et démunie qui accepte de se prostituer occasionnellement en France en échange de cours à la faculté en histoire de l'art. Bien entendu, sa naïveté est rétribuée en monnaie de singe sadien et elle apprend sur le trottoir ce que signifie l'expression : les malheurs de la vertu.
Elémentaire, mon cher Watson!

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