jeudi 20 septembre 2007

Les chemins du plaisir 99

Le coup du plaisir cru comme plaisir vrai ou plaisir réel me rappelle étrangement l'expression : "Le roi est nu"... Allez savoir pourquoi! A la réflexion, j'ai mon hypothèse sous le coude : on a beau chercher à découvrir le vrai réel dans le sang de la crudité, on a beau expliquer sans gloire que le plaisir relève de l'expérience de l'écorché vif, la vérité de la pornographie rejoint la vérité du réel : malgré tous nos efforts pour apercevoir le Saint-Graal, en l'occurrence la vérité du réel, tout effeuillage n'est jamais qu'une arnaque. Quand bien même le strip tease serait des plus experts, le voyeur ne voit littéralement rien, rien d'autre que du réel, de l'ordre - et basta. Raison pour laquelle l'effeuillage, qui suppose qu'on enlève la première couche, ne laissera jamais apparaître qu'une deuxième couche - opération bien connue des poseurs de papiers peints. Quand bien même la personne qui réalise l'effeuillage irait jusqu'à sacrifier sa vie en s'écorchant la peau, ce ne sera jamais qu'une troisième couche - et ainsi de suite. Sans doute le snuff movie participe-t-il de cette manie perverse de découvrir le réel sous les apparences, jusqu'à la mort. La poursuite de cette obsession est totalement vaine. Le plus aguerri des enquêteurs rentrerait bredouille, déçu de n'avoir jamais distingué qu'une indéfinie superposition de couches les unes sur les autres, un certain ordre sur un certain ordre, à l'infini. Cette constatation sonne l'échec de la pornographie (au passage, on mesure à quel point les accusations de monomanie d'Ogien relèvent de la démarche pornographique). Loin d'accoucher de la vérité du réel, le plaisir cru n'a rien d'autre à divulguer que sa crudité, soit le fait que l'ordre cèle l'ordre, selon le sceau du cercle vertueux. On comprend l'expérience déceptive de tout effeuillage, de tout spectacle pornographique, de toute expérience prostitutionnelle. Fondamentalement, l'acteur de ce jeu de dupes attendait de découvrir la vérité sous la réduction - le réel sous l'objet. Il n'aura obtenu qu'un peu d'ordre habituel - et du néant. De plaisir véritable, point du tout. Raison pour laquelle, pour finir, face à ce vent (dans tous les sens du terme, puisque aujourd'hui, un vent signifie aussi un râteau), l'individu en quête de plaisir et de réel risque fort, s'il ne comprend pas au moins intuitivement les raisons de sa mésaventure et de sa déconfiture, de sombrer dans la surenchère. Pour combler la béance de l'échec, il se voit contraint d'augmenter les doses, dans l'illusion de trouver un plaisir qu'à l'instar du toxicomane, il n'est pas prêt de trouver.
Le Comte est bon!

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