jeudi 20 septembre 2007

Les chemins du plaisir 97

Ogien : "C'est une conception qui est tout à fait respectable de la sexualité. On pense que le point de départ, il faut dire, enfin la tradition philosophique, l'arrière-fond si vous voulez de cette conception, c'est que le sexe cru, sans lendemain, sans amour, pour de l'argent, etcétéra, est mauvais, donc y'a quelque chose là-dedans si vous voulez, y'a par contraste une conception de la sexualité qui nous est vendue et qui a tendance à considérer que, a priori, si la sexualité n'est pas encadrée d'une certaine façon, alors quelque chose qui pourrait détériorer les rapports humains, ou le rapport de la personne à elle-même, ou toutes sortes d'autres choses..."

Ogien procède à tellement de confusions logiques qu'elles s'ajoutent encore, si besoin en était, à sa diction confuse... Courage, Koffi, la bête remue encore, mais elle est à terre!
1) La conception respectable en question, c'est la conception de Marzano, en gros la conception chrétienne, pour simplifier, et, en philosophie, la conception d'obédience kantienne (la liberté suppose sa limite, autant extrinsèque qu'intrinsèque).
2) La duplication fantomatique est l'arme du raisonnement de la mauvaise foi. Ogien utilise l'argument bien connu des rhéteurs réglementaristes en matière de prostitution : ce n'est pas que la prostitution forcée n'existe pas, bien au contraire; c'est qu'il existe aussi une prostitution libre... Idem pour Ogien : la conception de Marzano est juste, à condition qu'elle respecte aussi d'autres conceptions du sexe. Justement, Ogien appelle à tolérer sa conception alternative, minoritaire sans doute, qui consiste par définition à remettre en question le principe de limitation. Par conséquent : Ogien appelle un principe à tolérer le principe qui lui est, non pas contraire, mais mortifère. C'est un peu comme s'il appelait la tolérance à respecter l'intolérance, faisant fi du fait que cette tolérance disparaîtrait si elle en venait à respecter l'intolérance. Où l'on voit qu'Ogien, comme tous les totalitaires, est dangereux.
3) S'en suit une longue énumération fort confuse.
4) Puis, miracle, une équivalence : "Le sexe cru, sans lendemain, sans amour, pour de l'argent". Si l'on comprend bien Ogien, le sexe sans lendemain, le sexe pour le sexe (formule courante, qui ne veut rien dire d'ailleurs) équivaudrait au sexe tarifé? Non seulement, l'amalgame est douteux, mais c'est qu'il ferait presque frémir de crainte le dragueur impénitent de boîtes, notre Ogien sans frein!
5) L'étymologie crudelis désigne la chair écorchée et sanglante (crudus renvoie ainsi au cru, soit au non digéré, à l'indigeste). On voit mal par quel coup de force, n'en déplaise à Clément Rosset, qui s'égare à chaque fois qu'il entre sur le terrain moral, la chair sanglante serait le réel vrai dans la mesure où la chair serait débarrassée de la peau. L'analogie est hasardeuse et incertaine. Surtout, en parlant de sexe cru, Ogien énonce une vérité profonde : le sexe est d'autant plus indigeste qu'il est dénué de sentiments - et il devient carrément sanglant quand il réduit l'individu à un objet. Ogien se rend-il compte que les mots qu'il invoque apporte le démenti le plus cuisant à sa théorie par ailleurs fumeuse (de partout, y compris du crâne)?
6) "Une conception de la sexualité qui nous est vendue" : au choix. Soit cette formule malencontreuse est hilarante; soit elle est obscène...
7) "Si la sexualité n'est pas encadrée d'une certaine façon" : Ogien prétend bien abolir l'encadrement de la sexualité, soit, non le fait de pratiquer des interdits étouffants et odieux, mais le fait, aussi extrémiste et dangereux, et sans doute beaucoup plus, de nier le principe de limitation. Outre que ce type de libération est utopique, il est aussi fortement destructeur...
8) "Toutes sortes d'autres choses" : encore le principe de réification à l'oeuvre, tant chez Ogien d'ailleurs que chez Ovidie. Une paille, bien entendu...
Le Comte étouffe!

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